Accueil>Journal> Journal n°5 (20/03/2008)

5Regards Croisés

  • Editorial : Un long chemin pour la liberté
    Regards Croisés, EDITO

  • Focal : Terrorisme, une menace globale
    Colloque organisé Humacoop et l'Ecole de la paix sur le terrorisme

  • Reportage : Rapport de mission d'EH en Israël.
    Rapport sur le mur qui sépare Israël de la Palestine, ainsi que sur les adolescents soldats tant palestiniens que israéliens

  • Interview : Un dur challenge
    Conflits et reconstruction, un dur challenge ; Fiche pays Israel par le Monde ; L’assèchement des finances publiques palestiennes; Compte rendu de Reporters sans Frontiéres.

Un long chemin pour la liberté

Nelson Mandela:

Nous sommes conscients que la route vers la liberté n’est pas facile.

Nous sommes conscients qu’aucun de nous ne peut réussir seul.

Nous devons donc agir ensemble, comme un peuple uni, vers une réconciliation nationale, vers la construction d’une nation, vers la naissance d’un nouveau monde.

Que la justice soit la même pour tous.

Que la paix existe pour tous.

Qu’il y ait du travail, du pain, de l’eau et du sel pour tous.

Que chacun d’entre nous sache que son corps, son esprit et son âme ont été libérés afin qu’ils puissent s’épanouir.

Que jamais, jamais plus ce pays magnifique ne revive l’expérience de l’oppression des uns par les autres, ni ne souffre à nouveau l’indignité d’être le paria du monde.

Que la liberté règne.

Que le soleil ne se couche jamais sur une réalisation humaine aussi éclatante !

Je ne suis pas vraiment libre si je prive quelqu'un d'autre de sa liberté. L'opprimé et l'oppresseur sont tous deux dépossédés de leur humanité.

Rapport de mission d'EH en Israël.

Auteur : Fernand Meunier et Pierre-Larry Pétrone

Rapport au format PDF de Fernand Meunier et de Pierre-Larry Pétrone « Rapport sur le mur qui sépare Israël de la Palestine, ainsi que sur les adolescents soldats tant palestiniens que israéliens. »

Un dur challenge

Conflits et reconstruction, un dur challenge.

Le nombre de conflits a diminué depuis la fin des années 1980, passant de 51 en 1992 à 29 en 2003. Cependant, selon le dernier rapport sur la sécurité internationale publié par l’université de British Columbia (Canada), les accords de paix sont rompus dans prés d’un cas sur deux mois de cinq ans après leur signature. Le travail de reconstruction res te encore complexe pour la communauté internationale, puisque la réussite des programmes de reconstruction se heurte à deux problèmes majeurs : la lassitude des bailleurs, qui depuis, la fin de guerre froide, ont du se substituer aux anciennes puissances tutélaires pour gérer et financer les sorties de crise, et les conditions d’insécurité souvent persistantes.

Sans réconciliation durable entre les différents groupes politiques, ethniques, religieux, car la majorité des conflits sont aujourd’hui internes aux Etats. Il est illusoire de prétendre remettre un pays sur pied. La communauté internationale colmate sans pour autant réparer.

L’agence des Nations Unies pour le développement intervient actuellement dans une soixantaine de pays. Leur action primordiale : ramener la confiance, désarmer les belligérants, faire rentrer les réfugiés, réintroduire au plus vite les services de base (éducation, santé, justice…).

La tache se relève d’autant plus délicate que les interventions se déroulent souvent dans des pays qui ont été fermés pendant plusieurs années, comme le Liberia ou la Sierra Leone, et restent méconnus des experts de la coopération internationale qui, pour pallier cette difficulté, sont tentés d’importer des pratiques expérimentées ailleurs sans appréhender la singularité du contexte local. Au risque de voir leur action susciter l’incompréhension sinon le rejet des populations.

Aujourd’hui, 80 % des pays les moins avancés ont connu un épisode de conflit armé au cours des quinze dernières années, et la majorité des conflits s’y déroule aujourd’hui. Selon la Banque Mondiale, plus la dépendance à l’égard des matières premières est forte et plus le revenu par habitant est faible et inégalement réparti, plus le risque de conflit armé interne est grand.

On ne prend pas les armes facilement. Mais, si la décision de livrer une guerre est généralement complexe et sous tendue par des causes multiples, seuls deux facteurs doivent être réunis pour qu’une guerre se produise : avoir un différent et posséder les ressources nécessaires pour se battre. En revanche, la nature des différents et les facteurs qui les font basculer dans la violence sont extrêmement variés.

Israël

Chef de l’état : Moshe Katsav

Premier ministre : Ehoud Olmert

Superficie : 21 000 Km2

Population : 7,2 millions d’habitants

Croissance ( 2005) : 5%

Chômage (2005) : 9%

Monnaie : nouveau shekel

L’économie israélienne a digéré sans trop de dommages la guerre qui a mobilisé en juillet et en août 2006 son armée contre la milice du Hezbollah à la suite de l’enlèvement de deux de ses soldats.

La croissance a évidemment marqué le pas au début du second semestre, mais elle devrait rester supérieure à 4% sur l’ensemble de l’année. Au premier semestre, l’économie israélienne avait, il est vrai, progressé à un rythme voisin de 6%. L’activité été ralentie pendant plus d’un mois par l’appel des réservistes et par l’évacuation partielle de sa population de la Galilée, qui contribue pour 20% à l’économie nationale.

Dans les zones touchées, les bombardements du Hezbollah n’ont pas affecté durablement l’appareil de production, ni le port de Haïfa. En revanche, l’impact médiatique de cette guerre a pesé sur le terrorisme, en net repli en juillet avec une chute de prés de 20% des arrivées. La part de ce secteur dans le produit intérieur brut (PIB) israélien n’était cependant que 2,2% en 2005, selon les statistiques officielles.

La croissance a été tirée en 2006 par la consommation privée, en hausse de 5,4% pour le premier semestre. Cette forte consommation s’explique par la réduction du chômage (un peu plus de 8% à la fin 2006) , la hausse des salaires réels et les baisses d’impôts.

L’optimisme a été mesuré par l’envol de la Bourse de Tel Aviv (+18% d’août à décembre), dont l’indice qui rassemble les 25 valeurs les plus importantes a battu un record à la fin de l’année. La confiance des investisseurs étrangers ne s’est pas démentie avec un afflux de 12,9 milliards d’euros. Ces investissements étrangers avaient été illustrés par le rachat de l’entreprise Iscar par le milliardaire américain Warren Buffet pour un montant de 3 milliards d’euros.

L’inflation, seul sujet d’inquiétude pour les premiers mois de forte croissance, s’est dissipée à la fin de l’année. La pression inflationniste alimentée par la hausse des prix du pétrole avait entraîné une montée des taux d’intérêt. La maîtrise de l’inflation au dessous de 3% (seuil franchi en début d’année) a permis à la Banque Centrale de baisser ses taux en octobre.

Sur la base de ces résultats, le Fonds monétaire international (FMI) a dressé un tableau élogieux de la conjoncture israélienne, « compte tenu du climat d’incertitude lié aux récents développements politiques et sécuritaires ». Le FMI prévoit des croissances supérieures aux hypothèses retenues par le ministère des finances israélien avec + 4,5% pour 2006 et + 4% pour 2007, au lieu de + 4,3% et + 3,8%.

Le FMI note aussi que malgré la guerre, les destructions dans le nord du pays et une augmentation des dépenses militaires liées aux opérations menées à Gaza, le déficit budgétaire par rapport au PIB devrait reculer de 1,5% en 2006. Le FMI invite cependant le gouvernement israélien à réduire la dette publique et le déficit budgétaire. La maîtrise de la dépense publique, à partir de 2003, a permis des baisses de l’ensemble des impôts dont ont profité ménages et entreprises, mais elle a également participé, du fait de la disparition de « filets » sociaux, à l’affaiblissement des couches les plus défavorisées de la population. Le nombre de pauvres reste important en Israël et les évacuations précipitées de la Galilée ont mis en évidence les capacités réduites de l’Etat d’intervenir dans l’urgence au niveau social. Cette carence a fait le jeu d’un Arcadi Gaydamak qui pourrait mêler à l’avenir philanthropie et ambitions politiques.

Les élections de mars, qui avaient vu la percée surprise du Parti des retraités et la relative bonne tenue du Parti travailliste, qui en avait fait son message principal, avaient déjà témoigné de la sensibilité de l’opinion israélienne aux questions sociales.

La santé économique solide d’Israël reste cependant tributaire des aléas régionaux et d’une éventuelle reprise des combats sur la frontière nord, sans parler du conflit avec les Palestiniens et de la menace directe que constitue, selon Israël, un Iran nucléarisé.

GP, le Monde.

L’assèchement des finances publiques palestiennes

La victoire du mouvement de la résistance islamique (Hamas) aux élections législatives de janvier 2006 a plongé les territoires palestiniens dans une crise comparable à celle enregistrée pendant les deux premières années de l’Intifada, en 2001, et en 2002. Le contrôle par les islamistes radicaux du gouvernement a entraîné la fin de la rétrocession aux Palestiniens du produits des taxes (droits de douane pour l’essentiel) collectés par Israël à leur profit.

Faute de pouvoir de disposer d’un port ou d’un aéroport qui leur soit propre, les Palestiniens sont obligés de faire transiter leurs importations par Israël. De même, les aides en provenance des pays arabes, de l’Union européenne et des Etats-Unis ont été gelées. Cet assèchement des finances publiques est survenu alors que les ressources étaient utilisées en totalité pour assurer le versement des salaires des agents de l’Autorité palestinienne et pour maintenir un fonctionnement minimum des services publics ( santé, éducation).

L’Autorité palestinienne évitait la banqueroute uniquement en empruntant aux banques locales (souvent avec en gage des actifs d’un fonds d’investissements), en différant le paiement de ses fournisseurs et en obtenant de certains contribuables importants des règlements anticipés d’impôts.

Avec le gel des aides internationales et surtout le blocage par Israël des taxes ( qui représentent un peu moins de la moitié des ressources mensuelles théoriques), la situation est devenue explosive, d’autant que les bouclages israéliens se sont accentués, notamment à Gaza, où l’activité économique a été considérablement réduite, obligeant certains entrepreneurs à se délocaliser en Egypte ou en Jordanie. L’Union Européenne a mis sur pied, au cours de l’été, un mécanisme intérimaire pour assurer l’acheminement d’une aide d’urgence. Les versements en provenance des pays arabes ont repris à partir de juillet mais ils ont été utilisés en grande partie pour honorer les dettes.

Les Palestiniens ont, de leur coté, augmenté les dépenses en gonflant les effectifs des fonctionnaires. Selon les observateurs du Fonds monétaires international, les finances publiques ne pourraient couvrir qu’entre 60 % et 70 % des besoins dans le cas, très hypothétique, d’un retour à la normale des rétrocessions israéliennes et du régime des aides internationales. Paradoxe, ces aides européennes auront été plus importantes en 2006 qu’en 2005, 665 millions d’euros au lieu de 550 millions, alors que la dégradation des services (scolaires et sanitaires) et la hausse du chômage se sont accentuées.

GP, le Monde

DOSSIER RSF

Superficie : 6 207 km2.

Population : 3 889 000.

Langue : arabe.

Chef de l’Etat : Mahmoud Abbas.

Autorité palestinienne - Rapport annuel 2007

Depuis l’arrivée du Hamas au pouvoir en janvier 2006, les professionnels de l’information sont confrontés à une double menace dans les Territoires palestiniens. Ils sont toujours victimes de tirs israéliens, mais, plus récemment, ils ont également été pris dans les affrontements très violents qui opposent les sympathisants du parti islamique et les membres du Fatah, dont est issu le président de l’Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas.

Alors que le retrait de l’armée israélienne de la bande de Gaza, en août 2005, laissait espérer une amélioration des conditions de sécurité des professionnels des médias dans les Territoires, les divisions internes entre le Hamas et le Fatah ont inauguré une nouvelle spirale de violences. C’est ainsi que le correspondant du quotidien français Libération, Didier François, a été blessé par balle 1e 17 décembre 2006 dans la ville de Gaza, cœur de cette lutte fratricide.

Catalogués pro-Hamas ou pro-Fatah, des dizaines de journalistes palestiniens ont été agressés. Des reporters des médias publics ont été, par exemple, attaqués alors qu’ils couvraient des événements organisés par le Hamas. En septembre 2006, les locaux de l’agence de presse publique WAFA ont été saccagés et leurs équipements détruits. Ce média a été visé à plusieurs reprises durant cette année car il est accusé par des responsables de faction et par le Premier ministre issu du Hamas, Ismaël Haniyeh, de relayer la propagande du Fatah. De même, les locaux de la Palestine Broadcasting Corporation (PBC, télévision et radio publiques) à Khan Younès, dans le sud de la bande de Gaza, ont été les victimes d’une attaque spectaculaire au mois de juin. Près d’une centaine de membres de la branche armée du Hamas, les brigades Ezzedine Al-Qassam, ont envahi le centre de transmission de la télévision, tiré sur du matériel et agressé des employés de la chaîne. Des organes de presse, affiliés à d’autres factions, ont également subi des exactions. À l’image de la radio Sawt al Chaâb, du Front populaire de libération de la Palestine (FPLP), dont les locaux ont été détruits le 1er novembre. L’unique émetteur de la station a été rendu inutilisable.

Les journalistes étrangers n’ont pas été épargnés par cette montée de violence dans les Territoires. Six d’entre eux ont été enlevés depuis le 1er janvier 2006, sans compter une tentative avortée contre deux reporters belges à Khan Younès. Ils ont tous été libérés sains et saufs après avoir été retenus captifs quelques heures voire quelques jours. Deux journalistes américains de Fox News, Steve Centanni et Olaf Wiig, kidnappés le 14 août à Gaza, n’ont été libérés que deux semaines plus tard. Leur enlèvement a été revendiqué par un groupe inconnu jusque-là qui demandait la libération de tous les musulmans détenus par les Etats-Unis dans un délai de trois jours. Il apparaît toutefois que ces enlèvements n’ont aucune motivation politique. L’absence d’enquêtes de l’Autorité palestinienne ne permet pas de déterminer les circonstances exactes de ces rapts, mais pour la plupart, Reporters sans frontières a recueilli des informations indiquant qu’ils étaient l’œuvre d’individus ou de groupes isolés cherchant à faire parler d’eux ou parfois, à obtenir un emploi.

Superficie : 21 060 km2.

Population : 6 725 000.

Langues : hébreu, arabe.

Chef du gouvernement : Ehud Olmert.

Israel - Rapport annuel 2007

Les journalistes israéliens bénéficient d’une liberté de ton inégalée dans la région. Mais si l’année 2006 a été l’une des moins dangereuses pour les journalistes depuis le début de la seconde Intifada, de nombreux problèmes persistent.

Avec dix-sept professionnels des médias blessés et aucune mort à déplorer, le nombre de journalistes victimes de tirs israéliens dans les Territoires palestiniens a baissé en 2006. Reporters sans frontières s’est rendue en décembre en Israël afin de dénoncer le manque de transparence des enquêtes menées par l’armée israélienne. Le bureau du porte-parole des forces de défense israéliennes a affirmé avoir conduit des investigations dans la plupart des cas. Mais, selon lui, les preuves recueillies se sont jusqu’à présent révélées "insuffisantes pour aboutir à des inculpations".

Plusieurs journalistes ont été blessés alors qu’ils couvraient l’actualité dans les Territoires palestiniens ou la guerre au Liban. Le 7 juillet, Hamid Al Khur, photographe de l’agence turque Ihlas, a reçu trois balles israéliennes alors qu’il filmait des affrontements entre des militants palestiniens et des troupes israéliennes à Beit Lahiya, dans le nord de la bande de Gaza. Quelques jours plus tard, une vingtaine de professionnels des médias couvraient une incursion israélienne dans la bande de Gaza lorsqu’ils ont été pris sous les tirs d’un char israélien. Ibrahim Atla, cameraman de la chaîne de télévision publique palestinienne, portait un gilet sur lequel était marqué "Media". Il a été touché par plusieurs éclats d’obus. Sa cage thoracique a été perforée. Son assistant a également été blessé ainsi qu’un journaliste de nationalité japonaise. Un véhicule de l’agence de presse Reuters a été endommagé.

Par ailleurs, les journalistes palestiniens sont confrontés à de nombreuses restrictions imposées par les autorités israéliennes qui les considèrent avant tout comme des ressortissants palestiniens. Leurs déplacements entre la bande de Gaza et la Cisjordanie sont donc interdits pour des raisons de sécurité. En 2006, les forces israéliennes n’ont pas hésité à envahir des locaux de médias ou les domiciles de journalistes dans les Territoires, à la recherche d’armes ou de "matériel illégal".

Enfin, des journalistes d’Al-Jazira ont été empêchés à plusieurs occasions de couvrir la guerre au Liban pendant l’été 2006. Walid Al-Omari, chef du bureau de la chaîne à Jérusalem, a été interpellé à deux reprises les 17 et 18 juillet, alors qu’il réalisait un reportage au nord du pays. Les membres d’une autre équipe d’Al-Jazira ont été menacés en direct. Alors qu’ils couvraient une incursion de Tsahal à Naplouse, un véhicule de l’armée s’est approché de la journaliste Jevara Al-Boudeiri. Des coups de feu ont été tirés. Le technicien de l’équipe, Waël Tantous, a été touché au pied par des balles en caoutchouc.